« Pourquoi tombons nous, Bruce ? Pour mieux apprendre à nous relever »
(Thomas Wayne à Bruce Wayne, Batman Begins)
Une semaine après avoir vu, en salle, un des pires films de ma vie, je devais donc me relever de cette gamelle affligeante. Je suis donc allé voir Ready Player One.
Le pitch :
Dans son testament, le créateur de l’OASIS, monde virtuel dont l’économie est devenue la plus stable du monde, révèle l’existence de trois easter eggs dont la découverte donnera au premier qui les débloquera l’entière propriété dudit monde virtuel, de l’entreprise qui la gère et de la fortune du défunt créateur. Cinq ans plus tard, alors qu’aucun n’a été débloqué, Wade Watts, geek doublé d’un nerd concernant les sujets vidéoludiques, l’OASIS ou son créateur, va découvrir la clé de la course permettant d’accéder au premier easter egg…
Le film :
Le futur dépeint par Ready Player One est une dystopie. Les inégalités se sont creusées, le monde est devenu la proie d’entreprises technologiques mix des GAFAM et de Steam, l’économie classique s’est vautrée, incitant la grande majorité des gens à se tourner vers le gaming et la participation à un monde virtuel pour gagner son pécule. Dans ce monde votre avatar gagne des choses pour améliorer ses capacités, ses perfs de jeu et de participation à divers défi et cela peut être converti en avantages dans le monde réel. Youhou. Si votre avatar meurt, il respawn automatiquement à un endroit donné, sauf que… Vous avez perdu tout votre stuff et tout l’argent accumulé sur le compte de votre avatar jusqu’à sa mort… Bref, tant que tu gagnes tout va bien, mais comme pour gagner plus tu dois risquer plus avec ton avatar…
L’OASIS offre une multitude d’endroits différents (on peut aussi bien y passer son temps dans un casino virtuel géant, que dans Minecraft ou dans WOW ou dans des îles paradisiaques en VR etc. Aller dans boîte danser en apesanteur et j’en passe) En gros c’est l’Internet version 10.1 en immersion totale. L’endroit le plus dangereux est un espèce de wasteland ou les avatars des gens bastonnent des mobs de ouf et éventuellement se bastonnent entre eux etc. et puis il y a deux éléments importants : les archives sur le créateur de l’OASIS (qui a méticuleusement archivé toute sa vie avant de décéder) et la course pour le premier easter egg. Une course d’autos, motos, monster trucks etc. (bref avec un moteur et des roues) parsemée de chausse-trappes, d’embûches dont la plus impressionnante est un avatar de King Kong qui non content de foutre le bordel sur toute une partie du trajet, arrive à la fin du parcours systématiquement avant les concurrents, défonçant la route, se plaçant devant l’arrivée et empêchant quiconque de passer.
On nous montre une édition de la course avant celle où le héros va trouver la soluce pour gagner (Un détail dans une archive sur le créateur, va lui mettre la puce à l’oreille) histoire de bien poser les choses. C’est l’occasion d’une palanquée d’effets spéciaux tous plus réussis les uns que les autres. Contrairement à Un Raccourci Dans Le Temps -vu une semaine avant donc- dont les effets spéciaux pléthoriques servent à masquer la vacuité totale, ici, l’ensemble n’est là que pour donner crédit à l’univers du film et soutenir le scénar. Il y a des choses très graphiques, y compris dans le monde non virtuel, mais à aucun moment on ne se dit « WoOt ?! » ou « WTF?! ». Dans Ready Player One on vous explique correctement dès les départ ce que vous avez besoin de savoir pour suivre le film et vous y retrouver, quand bien même les jeux vidéos et la culture geek ne seraient pas votre univers de base. Il y a des références geeks qui sont soulignées par les personnages (« Hey, c’est la moto de Kaneda dans Akira !! ») et d’autres plus discrètes comme ce moment où j’ai spoté un avatar copiant le look de Blanka de Street Fighter II (et j’en ai sans doute raté d’autres, j’ai re-regardé le film depuis, en ligne, oui, oui, je sais « çay mal » comme disent les djeunz!), mais je me suis re laissé prendre dans l’ambiance comme en salle et j’ai oublié d’en chercher d’autres…
Allez je ne vous spoile pas plus.
La Critique :
Contrairement à l’étron de la semaine précédente, qui se gargarisait d’avoir Reese Witherspoon et Oprah Winfrey au casting, ici pas d’acteur archi connu mis en avant. Le plus connu internationalement de toute la bande est Simon Pegg et il apparaît lui-même moins de 5 minutes à l’écran (Même si il a un rôle clé qui est lui… un peu plus long ^^), ensuite le rôle principal est joué par Tye Sheridan qui jouait Cyclope X-Men Apocalypse (et reviendra dans Dark Phoenix), et le premier rôle féminin sera familier aux fans de Bates Motel (dont je ne fais pas partie) et les fans de Killjoys retrouverons avec joie Hannah John-Kamen ( ❤ ) dans un second rôle qui n’est pas totalement sans rappeler Dutch ( ❤ ) (j’aime beaucoup cette petite série et cette actrice et son personnage dans cette série, mais vous vous en doutiez non ?)
Comme c’est un blockbuster, le scénario n’est pas exceptionnellement compliqué, ni révolutionnaire, la narration non plus, les personnages sont certes, sans doute, un peu unidimensionnels et n’ont pas la profondeur d’un Elio dans Call Me By Your Name, mais ça ne les rend pas insupportables pour autant, et on arrive à s’attacher à eux le temps du film, suffisamment pour être content pour le héros et ses potes à la fin.
Le principal argument promo du film était donc que c’est le dernier Spielberg en date. Il était donc logique que ce soit un bon film (Ce type a-t-il eu un accident industriel depuis ET, en fait ? Non, hein ? On est d’accord ?). Un film de geek, par un geek, avec des références geek juste ce qu’il faut, qui ne tourne pas la culture geek en dérision et qui reste accessible à tous. Pari réussi.
Après, l’univers du film reste quand même assez sombre quand on y pense, tous ces gens qui cherchent l’évasion à se faire du pognon en ligne ou à s’évader du réel parce que c’est la merde dans leur vie et… oh wait. Sounds like 2010’s. Bon l’univers du film est un peu plus morose encore, le terrorisme religieux et les dictatures en moins, une Amérique (et un monde a priori) plus inégalitaire et « meh » en plus. Et le héros devient un héritier capitaliste à la fin (mais avec des idéaux humains alors ça va, hein, il peut bien aimer son pognon). La victoire du gamer sur la grosse boiboite tech à la conquête de l’OASIS, c’est un peu l’espoir de Spielberg de voir les gens reprendre le pouvoir sur les GAFA et les grosses multinationales ? Sa bonne conscience de gauche ? Sans doute.
Est-ce le film le plus révolutionnaire de Spielberg ? Non, loin s’en faut.
Est-ce le film de l’année ? So far, oui. Mais il y a Avengers : Infinity Wars qui arrive, et c’est quitte ou double, soit c’est le monument que ça a l’air d’être, soit c’est grave une pure bouse, bref, attendons de voir. Et on sait jamais ce que nous réserve l’année comme surprise.
Est-il mieux que Black Panther ? Oui et non. Oui de façon très subjective, parce qu’il touche à une culture qui m’est chère (geek/vidéoludique…) à titre perso, non, intellectuellement, parce que c’est moins un tournant pop culturel, représentatif ethniquement et sociologiquement. (Bon et puis dans Black Panther y a des arguments à base de Micheal B. Jordan. Qui plus est torse nu. Arf. What’s my name again ? Just call me your bitch, Mikey.)
Après ça reste un Spielberg et la forme est d’une propreté, d’une justesse fantastique, et, paradoxalement, vu la quantité d’effet spéciaux débauchés, d’une certaine sobriété pour mon oeil de petit geek blanc, là où Black Panther me tapait à l’oeil à chaque plan par sa touche de différence culturelle (quoique très américain quand même, hein). Du coup, je n’ai pas très envie de les comparer plus que ça, parce que ce serait ne rendre justice ni à l’un ni à l’autre.
Last but not least : je découvre en rédigeant cette critique que RPO est tiré d’un roman éponyme. Et contrairement à celui dont est tiré la Bouse Dans Le Temps, j’ai très envie de le lire après avoir vu le film !
Le verdict : 4/5
Ready Player One, c’est très plaisant, mangez-en.