Becoming

Il y a dix ans, j’étais dépressif, en banqueroute complète, tentant vainement de trouver une activité, en galère depuis 2 ans et et je ne me voyais pas d’avenir. J’ai fêté mes trente ans avec un groupe de personnes dont j’étais proche à Paris. J’ai reçu des textos pour me les souhaiter bons, de la famille étendue, d’autres amis, de simples potes, de contact des réseaux sociaux. Le blog était peu commenté mais toujours lu par une centaine de visiteur semaine, malgré un rythme de plus en plus irrégulier.

J’ai quitté Paris, un an plus tard, en 2011. J’ai perdu d’un coup la moitié de mes contacts parisiens. Sans déconner. Je les ai vu disparaître de ma liste d’amis, sur Facebook et de mes mutuels Twitter, en quelques mois, et une autre large partie, dans l’année qui a suivi. J’étais un échec avéré. Personne ne veut sentir l’échec. J’ai revu mes meilleurs amis des années d’études brestoises. Un peu. Ils ont été adorables, mais leurs couples, leurs chez eux douillets, leur stabilité, tout ça m’était alors tellement douloureux. La distance physique pendant 7 ans avait rongé nos liens, la distance de nos situations m’a poussé à achever le travail. Je n’ai pas osé revenir vers eux à ce jour. Ils vivent et sont heureux sans moi, après tout. Amen.

J’ai fait de nouvelles connaissances, pris part à une association, pour avoir une activité, une, au moins, qui me tienne à coeur, qui me tienne en vie, pendant que la vie professionnelle continuait d’être chaotique, incertaine et ma santé mentale avec. Les relations avec les parents se sont détériorés. Ils ne comprenaient pas la place que j’accordais à l’associatif, ils ne comprenaient pas que j’étais déprimé, ils en attendaient plus que je n’étais capable de donner. J’étais en vrac. au fond d’un trou. Et mes propres parents, toubibs, refusaient de voir la réalité en face, pour ne pas culpabiliser encore plus, sans doute. Du « on te soutiendra toujours sans conditions » on est passé à « il faut que tu quittes la maison ». Et je suis parti, vivre chez deux amies. pendant 9 mois. Je leur dois la vie.

La galère a pris fin le 24 Août 2016, après 9 années. La Reine m’a été enlevée. Je me suis mis à fréquenter assidument le centre LGBT local. J’ai rencontré des gens. J’en ai même fréquenté un bon moment. J’ai trouvé The Duncan. Et puis les autres valentins. J’ai ré-ouvert ici en janvier 2018, dépublié, supprimé, trié, tout ce qui restait d’avant, seule la litanie contre la peur, de Dune, reste, d’avant, avec une date modifiée, mais je n’ai pas vraiment recommencé à rebloguer, juste commencé à en avoir l’idée.

A la Marche des Fiertés 2018 de Rennes, nous avons décidé, The Duncan et moi, qu’on ferait celle de 2019 à New York. En juillet, j’ai quitté Facebook, pour quelques temps, fin Août j’ai décidé que je n’y viendrais plus. J’ai mis un dernier statut avec mes coordonnées, pour celleux qui voudraient. En Novembre, j’ai désactivé le profil. En janvier 2019, j’ai demandé sa suppression, effective 15 jours plus tard.Je n’ai plus de nouvelles d’aucun d’entre eux, sauf ceux qui sont sur Twitter. Pire, les contacts que je voyais IRL ont carrément oublié mon existence depuis. J’ai appelé certains. Un temps. Et puis j’ai arrêté. Je suis mort socialement en 2018. Et je ne sais toujours pas quoi en penser. A part, peut-être, que c’est la vie ?

Le 25 juin 2019, j’ai pris l’avion à CDG pour aller aux USA, 9 ans et 10 mois après la fois précédente. Je suis allé à New-York avec lui. J’ai été pompette au Stonewall Inn avec un groupe de lesbiennes américaines adorables et déjantées. J’ai détesté traverser le Manhattan Bridge. J’ai lutté contre mon vertige en montant en haut de l’Empire State, du One World Trade et du Rockefeller. J’ai été voir le Fantôme de l’Opéra au Majestic sur Broadway. J’ai eu 39 ans là bas, dans un hélicoptère, au dessus, de Manhattan. On a repris l’avion à JFK le lendemain, et j’étais bien.

Hier j’ai eu 40 ans. A part ma mère, The Duncan et Matoo, qui l’a su en passant par ici, personne ne m’a appelé. Ni mon père, ni ma soeur, ni la famille, ni mes amis (remarquez lesquels ?), mes collègues, ni personne. J’ai passé la soirée avec Lui, il a fait un truc tout con à manger on s’est vautré sur le canapé pour regarder Downton Abbey, deux mille ans après le reste du monde, et hululer de rire à chaque intervention de la comtesse douairière Grantham. Mon cadeau arrive plus tard. On s’en fout. C’était bien.

Mon père, depuis que je suis gamin, n’a jamais vraiment eu de vie sociale, il a un seul ami, quelques personnes qu’il fréquente à l’occasion, quand vraiment il a envie de voir du monde, mais sinon, il a une vie assez autocentrée, assez domestiquement centrée : le boulot, le jardin, un peu de bateau, la maison, suivre les programmes TV qui l’intéressent, lire… Je suis en train de devenir comme lui. A une époque ça m’aurait flippé. Aujourd’hui, ça me réjouit assez.

 

Crédit image en-tête : inconnu (S’il s’agit de votre travail, merci de me le signaler que je puisse, au moins, vous créditer)

Un commentaire Ajoutez le vôtre

  1. Matoo dit :

    « A la fin on meurt » comme tu dis. 😀

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