Masquerade !

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6 mois. Voilà 6 mois que nous avançons masqués. Personnellement, j’avais commencé un peu avant le 15 mars, après les échanges avec les parents, toubibs en retraite, et le Duncan, futur docteur diplômé de l’école des docteurs diplômés. C’était lourd au début, et puis on s’est habitués. Enfin, pas tous. Une minorité d’irréductibles gaulois refuse catégoriquement de le porter, à cause de l’inconfort, le plus souvent, et puis parfois à cause de théories plus ou moins fumeuses, voire carrément déglinguées

En ce moment, à la réception de l’hôtel, je ne reconnais plus personne, ou presque. Les archi-habitués dont j’ai intégré complètement les attitudes, la gestuelle, les yeux, etc. au bout de quatre ans, pas de problèmes. Mais alors les autres… Je dis bonjour trois fois à la même personne : quand elle descend au petit déjeuner, quand je la recroise dans la matinée, et quand elle vient me régler avec son blouson avant de partir… Alors on en rit. Parce qu’un des trucs les plus drôles, dans cette pandémie, c’est bien ça : à part une toute petite minorité de cons, 99,9% des clients sont adorables, plus encore que d’habitude, d’autant qu’ils voient bien qu’on fait notre max pour avoir un semblant de vie hôtelière normale, le gel hydroalcoolique et les gestes barrières un peu partout en plus.

Et puis au quotidien, il y a toutes ces personnes dont on croise le regard alors que d’habitude, on passerait les yeux sur leur face dans sa globalité et basta. Le masque nous oblige à focaliser sur ce qui reste d’humain là où on devrait avoir une visage, une personne. J’ai du mal à soutenir le regard des gens que je ne connais pas un peu en temps normal (ce qui dans mon métier est un handicap, mais je le masque (hin hin hin) avec de l’humour et le fait que je suis généralement en train de manipuler le logiciel hôtelier en même temps), mais là, masqué, j’y arrive mieux, curieusement. Le masque remet une distance, une part de mystère. Cett personne aux yeux si souriants, si expressifs, a-t-elle l’air aussi sympathique sans son masque ? Avec son masque est-on plus soi-même ou moins ? Est-on plus bienveillant ou plus méfiant ?

L’autre matin, on discutait enfin avec une collègue du fait que si ça continue, le moment où quelqu’un enlève son masque va devenir tellement chargé en terme de relationnel humain, que ça va devenir un vrai moment d’érotisme torride. Tu rencontres et dragues un mec avec un petit cul d’enfer et des épaules bien comme tu les aimes, le courant passe bien, mais vous ne vous êtes pas encore vu sans masque, l’excitation est à son comble ! Le soir même un twitto posait la même question : enlever son masque va-t-il devenir bientôt, un strip tease du visage avec la même charge érotique que celui du corps ?

En attendant, le masque protège, les autres de nos microbes et virus, et nous même des leurs, de même que le lavage régulier des mains. Et il suffit d’un semblant de notions d’hygiène de base pour ne pas avoir besoin d’interroger cela. Et s’il doit devenir l’accessoire de base du quotidien pendant plusieurs années, so be it. Et oui, il faudra sans doute ré-imaginer totalement certaines activités. Mais entre ça et le changement climatique, il y a déjà tellement de choses qu’on va devoir ré-imaginer… La mascarade, c’est de vouloir croire ou faire croire qu’on peut toujours continue à vivre « comme avant », dans une insouciance alors supposée totale (biais cognitif), alors que le monde change en permanence. Si le masque sanitaire pouvait être l’occasion d’en tomber d’autres !

 

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