Bon, je viens de finir le premier épisode de Drag Race France, au moment ou je commence ce billet. Il y a de l’excellent, du très bon, du bon, quelques meh, un « gros « sashay » à vomi » (pour moi) m’enfin, on est loin loin loin loin loin de l’accident industriel (sauf si personne regarde, mais ça c’est encore autre chose). On va aller crescendo, histore de finir sur le plus positif, parce que, spoiler, au final, cette version française n’est pas mal du tout 🙂

Le gros « sashay » à vomi :

On va commencer par ça, comme ça ce sera dit, et on en parlera plus : « ICI ÇEY LA FRÔÔNCE ! »
Ça  commence avec le carton titre du générique. Pas de soucis avec la typo RPDR qui est bien reprise et agrémentée d’un A en forme de Tour Eiffel, okay, okay, okay. MAIS CE FOND BLEU ET ROUGE BORDAYL !!! La charte graphique d’origine propose un contraste entre la typo rose et le fond bleu clair « lumière, glam, fraîcheur, brise légère », là on dirait un vomito orgeat.

Alors j’ai bien compris que c’était Drag Race FRANCE, parce que c’est écrit dans le titre d’une part, et que je le regarde sur un des sites de FRANCE télévision. Mais c’est collé à TOUTES LES SAUCES, y a pas 10 minutes d’émission sans que ça soit rappelé quelque part : dans la work room, l’entrée se fait sous les pieds d’une Tour Eiffel en carton pâte. Et vas-y qu’on te colle des danseuses de cancan dans le photo shoot à côté d’une colonne Morris dans une ambiance cheap de cabaret… Quand Nicky Doll arrive, c’est signalé par un chant de coq, elle répète le titre 1000 fois dans l’épisode (même RuPaul ne cite pas le nom de l’émission autant dans la version US, enfin !) et y a même eu une paraphrase de la Marseillaise à la fin avec main sur le coeur, non mais SERIEUX ?!! ET VEt je suis certain que j’en oublie (et je vais pas me re-taper 1h d’émission juste pour recenser toutes les instances du truc). C’est juste trop. J’ai eu la sensation d’être dans un programme drago-nationaliste à un moment. Remarquez ce serait une première et vaguement dans l’air du temps, malheuresement, mais tellement à l’encontre de tout ce que le drag représente !

C’est présent dans les autres versions bien entendu, mais plus diffus sur la totalité d’une saison, là j’ai la sensation d’avoir tout pris dans la gueule en un épisode. Bref, please tone down le côté « ceci est la France » et la fierté nationale, par pitié, c’est vraiment le seul truc qui m’a réellement perturbé.

Les trucs un peu « Meh » :

Les traductions de phrase icônique de la VO en français.  « Shantay, tu restes » et Sashay « c’est terminé », c’est pas très heureux. « Shantay, bien joué ! » ou « Sashay vous retirez » auraient sonné mieux, mais c’est toujours casse gueule d’adapter des expressions d’une langue à l’autre, encore plus lorsqu’elles sont icôniques (Si je me rappelle bien la drag queen qui présente en Espagne par exemple, n’a pas repris d’ailleurs les shantay et sashay pour évite ce genre d’écueil et a proposé ses propres formules en espagnol). Et « Surtout, ne merdez pas » lui me va assez bien a priori, mais a été mal utilisé.

Il eût été bien d’introduire le talent show juste après la présentation du jury, là même si on le sait, la transition arrive un peu comme un cheveux sur la soupe.

Nicky Doll est une novice du téléprompteur, ça se voit un peu. Sa présentation est un peu rigide, pas assez naturelle, trop théâtrale sauf quand elle reprend le geste le plus théâtral de RuPaul, justement : « Que la meilleur drag queen gagne » en levant le bras, ce qui est un comble.  Nicky, t’as Daphné Burki avec toi, demande lui des tips, c’est une pro des émissions dans ‘l’étrange lucarne’ (copyright le Prince de Hénin). C’est pas rédhibitoire, c’est pas grave, mais ça donnerait un meilleur allant à l’émission. là ça fait un peu balai dans le cul (encore une fois, un comble pour une émission de drag !) Ceci dit, Nicky Doll fait quand même le job assez correctement,  et sans doute qu’il y avait un peu de stress pour cette première saison à tenir les rennes d’une telle franchise.

Les confessionnaux font graaaaaave forcés. On le SAIT que c’est de la télé réalité. On le SAIT que tout est monté, trafiqué, et que rien n’est vrai dans tout ce que les queen bitchent dans le confessional, mais bordel, là ça daube le forcing à mort et la mauvaise direction d’acting des queens. Le bitching n’a pas l’air aussi naturel que dans les autres versions que j’ai maté (US, UK, España et Netherlands, encore que pour ces deux dernières je ne possède pas assez la langue pour avoir raté un peu de ça. mais les bitch anglophone n’y vont pas de main morte et ont l’air naturel, même quand c’est pour le show. Les queens françaises pas du tout, c’est dommage.)

Je peux me tromper mais il n’y a pas de récompense en cash pour la gagnante, juste une couronne et un sceptre d’une valeur de 40 00€ et un voyage d’une semaine je ne sais plus où. Alors je me doute qu’elles sont rémunérées à minima comme intermittentes du spectacles par la prod, parce que comme tout candidat de télé réalité française, elle doivent avoir un contrat de travail pour l’émission sans doute, mais dans la mesure où les queens ne roulent pas forcément sur l’or, je trouve que c’est dommage de ne pas filer un coup de pouce en cash à la gagnante. (ça s’appelle redonner à la communauté). J’espère pour les queens que les retombées en terme de boulot et de revenus seront réelles parce que pour l’instant c’est de la visibilité et un salaire inconnu dont il reste à déterminé s’il est honnête ou pas.

Le montage de certaines séquences. Le talent show a été monté à la truelle. Sérieusement.  je sais bien que vous essayiez de faire rentrer un max de truc dans un format de 1h-1h10, la production, mais alors, raccourcissez le montage du mini challenge ou de la préparation des queens dans la work-room, et laissez plus de place au maxi-challenge bordeyl. parce que là, y a des queens dont le passage est passé au hachoir, saucissonné et vous avez becqueté des tranches avec l’apéro, c’est confus, irrespectueux pour la queen (surtout si c’est une chanson) et même si y a une réplique de quelqu’un qui lâche « ça s’éternise », faut qu’on le sente dans le montage, pas qu’on ait l’impression en huits plans de coupe de la queen sous un angles puis un autre que vous avez juste collé l’ensemble au scotch et à la colle UhU.

Le bon :

Le jury, une queen maîtresse de cérémonie et quatre personnalités pour l’accompagner, c’est pas mal. J’aime bien Kiddy Smile avec sa culture ballroom, son engagement dans les luttes LGBTQI+ comme membre permanent du jury. J’aime bien Daphné Bürki et son côté fille à pédés issue de la mode, même si on est loin d’avoir trouvé une Michelle Visage à la Française (M’enfin faudrait un mix entre elle et Marianne James ou Laurence Boccolini pour avoir quelque chose qui s’approche de la fag hag de RuPaul en version française). Jean-Paul Gaultier aurait été tout aussi bien qu’elle en membre permanent, mais ça aurait fait un jury 100% masculin, et clairement c’eût été dommage (et sexiste !). Mais que JPG revienne régulièrement  en alternance avec une ou deux autres personnalités bien queer (Comme Ross Mathews et Carson Kressly et quelques autres qui alternent sur le show US) ! Bon après j’étais moins hypé par Iris Mittenaere, mais c’est juste que j’en ai plus rien à branler des Miss France depuis un moment en dehors de la curiosité de voir la gueule de l’heureuse élue, le bouzin fini. Mais tout le monde était bienveillant, les critiques étaient justes, jamais volées, ça manquait un peu de vraies bonne blagues ou de dad jokes moins évidentes et plus camp, mais c’est que le premier épisode, laissons tout le monde s’installer.

Le très bon :

L’Atelier. C’est rose, c’est hystérique, c’est très bien. Peut-être un peu petit, je n’arrive pas à évaluer la taille du plateau, et de ce que j’en ai vu, ça manque de rack de tissus dans un coin et d’accessoires à disposition (paillette, maquillage etc), qu’on aperçoit parfois dans la work-room de la version US. il y a bien les grandes tables de travail, les grand miroirs devant lesquels se maquiller, des portraits de Nicky au mur (dammit, y a pas RuPaul ? WTF ? ça rentrait pas dans le contrat sans doute ?) Mais c’est moins cheap que l’atelier de la première saison US (et y a pas le filtre « brouillard subliminal matinal diffus » de cette première saison là non plus, ouf !), l’entrée nous rappelle juste ce qu’il faut qu’on est en France, sinon ça va.

On est dans une éditio locale de Drag Race, tous les repères sont bien là : l’Atelier, le Runway, la table des juges avec des personnes en lien avec la mode et le milieu queer/drag, les confessionnaux sur fond rose etc. La production a mis des moyens, c’est way moins cheap que ça aurait pu l’être, c’est pas exactement au niveau des version US ou UK, mais ça n’a pas grand chose à envier à la version espagnole ou à la version hollandaise en terme de décorum et de reprise de l’esprit général de la franchise.

L’excellent :

Les drag queens elle-même. Il y a un joli niveau de savoir faire en matière de look, certaines drag ont sans doute commencé sous l’influence de Drag Race US, après au niveau des talents et de la fierceness au delà du look, il y a du boulot parfois sans doute, mais on a joli panel de queen diverses et qui connaissent leur art et ont un peu de culture drag a priori, de culture queer très clairement et un peu de culture militante (soft ou plus hard, allez savoir) sans doute pour certaines. Bref, ça va dépoter question tenues et quand Jean-Paul Gaultier Himself, lâche que certaines des tenues inspirées par ses créations sur le Runway de Drag Race sont meilleures que ses originaux, on va le croire, hein, d’autant que j’ai pas trouvé ça trop volé comme compliement pour les concernées.

Le casting est très blanc, c’est indéniable. C’est « La FRÔÔnce », quoi. (Comment ça, ça me reste en travers de la gorge ? MAIS OUI, PUTAIN, ça me reste en travers de la gorge !) Mais, il y a une femme trans, il y a des grosses queens fières, il y a des queens racisées (3 que j’identifie sur 10, c’est un début honnête pour « la FRÔÔnce », surtout que celle de St Denis dans le 9-3 est totalement queer et fierce with charisma uniqueness nerve and talent), et toutes ont l’air d’avoir un bagage que le drag leur a permis de dépasser, bref, c’est pas juste des « Instagram look queens » a priori.

Et il y a eu un joli moment sur l’amour de soit dans l’Atelier pendant que les queens se préparaient ou se dédragifiaient (mention à La Briochée qui est super à l’aise torse nu au milieu des torses plats de ses collègues masculins et enbys, flaunt your boobs girl ! YEAH !)

Mon avis général : « Condragulations ! You’re the winner of this week’s challenge ! »

C’est pas mauvais loin de là, même si ça nécessitera un peu de paufinage, pour les épisodes suivant et pour une deuxième saison éventuelle.

Mais l’essentiel est là et le niveau des drag queens vaut carrément le coup au moins pour les Runway. je suis un peu triste pour celle qui a été éliminée en premier, (je vous spoil pas) parce que clairement, elle n’était pas à son top mental arrivé au moment du lipsynch, parce que du coup, elle s’est un peu fait éclipser par quelqu’un de moins « polished and finished » dans ses looks et son talent show, mais plus présente et plus remarquable au moment du lipsynch.

Certains considèrent déjà, en ligne, qu’elle a été spoliée (DRAMA !), je ne trouve pas. It says « Lipsynch for your life », baby, et après l’annonce du bottom two, son coeur n’y était clairement plus autant que celui de sa concurrente qui faisait tout pour tirer l’oeil pendant qu’elle lipsynchait sur la Prière Païenne de Céline Dion, il est question d’être à genou et de faire une prière païenne dans cette chanson, je suis étonné qu’aucune des deux concurrentes n’ai mimé, même brièvement, une air fellation, ce qui lui aurait valu d’être sauvée à coup sûr.

Bref, on verra la suite, mais le premier épisode laisse augurer une jolie compétition et première saison tout à fait correcte 🙂